Une semaine à 79° latitude Nord

Thierry Coupez, expert en calcul intensif et mécanique des fluides, en mission à Svalbard

10 avril 2019

Une semaine dans les régions arctiques pour enregistrer des mesures sur les mouvements de la glace, les ondes élastiques induites par la houle et de relever les propriétés de l’eau de mer et son interaction avec la glace.

 

 

La recherche est un métier riche en surprises. Thierry Coupez, numéricien expert en calcul intensif et mécanique des fluides, revient d'une mission d'une semaine dont le but est la relève de mesures sur le terrain… Et pas n'importe lequel : un fjord encore pris dans les glaces à 79° de latitude nord dans l'archipel de Svalbard.

Onze personnes ont participé à cette mission, dont deux doctorants et trois étudiants master. Les équipements nécessaires aux mesures avaient été acheminés d'Oslo. Le centre universitaire UNIS situé à Longyearbyen a fourni les scooters des neiges indispensables pour aller sur le site retenu pour les mesures.

 

De retour, Thierry Coupez nous en dit plus :

Le trajet dure environ 2h30 pour se rendre sur le lieu d'études et autant pour rentrer, à -18°C/-15°C, les journées sont intenses. Si les conditions climatiques n'ont pas permis d'y aller tous les jours, nous avons pu faire des essais de drone sous-marin qui nous ont permis d'acquérir des images jusqu'à une centaine de mètres sous la surface de la glace.

Le travail s'intéresse principalement à la mécanique des fluides, l'interaction eau/glace étant encore assez mal connue, notamment aux échelles intermédiaires des fjords. L'objet d'étude est exceptionnel sur un terrain vierge. Cela permet d'inventer de nouveaux moyens de récolter des données, de nouvelles approches scientifiques.

Ici, je suis en support, je donne un coup de main. Je suis un mordu de haute montagne. C'est fantastique, j'ai une occasion exceptionnelle d'associer mes deux passions : la science et les grands espaces. J'espère faire partie de la prochaine mission en automne dont l'objet sera de remorquer un iceberg flottant. D'ici là, nous allons travailler sur le traitement des données, on a déjà commencé en fait.

 
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

C’est dans le cadre du projet "DOFI" (Dynamics of Floating Ice) financé par le Conseil de la Recherche de Norvège que Thierry Coupez est parti.

L'objectif de DOFI : apporter une meilleure connaissance de ce territoire complexe.

La région arctique de par les changements climatiques et les avancées technologiques offre de nouvelles opportunités de développement d'activités humaines (industrie, tourisme, voies de navigation entre l'Europe et l'Asie). Une compréhension scientifique de l'environnement arctique est nécessaire pour aider à mieux anticiper les dangers de la glace de mer et permettre une valorisation saine des régions polaires, sûre et respectueuse de l'environnement.

 


 

 

Le projet DOFI regroupe les acteurs scientifiques suivants :

 

Il a démarré en 2018 pour une durée de trois ans. Le projet comprend des mesures sur le terrain, des expériences en laboratoire et de la simulation intensive. Ce territoire est le plus souvent investi par les chercheurs en météorologie, c'est la première fois qu'un projet arctique est porté par un laboratoire de mathématiques. Thierry Coupez travaillera à la simulation numérique des mouvements de icebergs par une approche directe en CFD.

 

 

>>  Vous pouvez voir plus d'images de l'expédition sur notre compte instagram cemef_mpt

 

En savoir plus

Making off d’une découverte, l’histoire d’une collaboration

8 octobre 2019

Projet_Psyche_Suzanne_Jacomet.jpeg

 

C'est l'histoire d'une collaboration hors des sentiers battus qui mène à des résultats exceptionnels. 

L'Université Côte d'Azur l'a annoncé : "une équipe internationale de chercheurs démontre que la trop faible présence de corps riches en fer dans la ceinture principale d'astéroïdes du système solaire n'est qu'apparente. Leurs résultats ont d'importantes implications sur notre compréhension des propriétés et de l'histoire des astéroïdes riches en fer… Ils s'appuient sur des expériences d'impact à haute vitesse de projectiles rocheux… sur des cibles d'acier et des météorites de fer…". >> voir tout l'article
 
Dans cette équipe, Suzanne Jacomet, ingénieur de recherche en microscopie au CEMEF. Elle a effectué les observations au MEB et réalisé les analyses de composition sur les cibles impactées (d'acier ou de météorites de fer). En voici quelques images. 
 
 
Image au MEB XL30  en électrons secondaires d’un cratère résultant d’un impact (5,08Km/s) d’un projectile basaltique de taille millimétrique sur un morceau de météorite de Fe (Gibeon) utilisée comme cible et simulant la surface d’un astéroïde riche en Fe
Sur l’Image en électrons rétrodiffusés, l’aspect sombre est lié au nappage du fond du cratère par un verre silicaté (initialement liquide au moment de l’impact)
 
Images au MEB XL30 en électrons rétrodiffusés du liquide d’impact (maintenant sous forme de verre) sur la paroi du cratère, qui montrent une forte vésicularité du nappage vitreux.
 Détail de l'intérieur du cratère
Même zone qui montre la répartition des éléments chimiques. Le nappage vitreux du liquide d'impact riche en silicium apparaît en rose fuschia, alors que la météorite Gibeon riche en fer apparaît en vert

 

 
 
 

 
L'histoire commence en 2014 à l'initiative de Guy Libourel, chercheur au Laboratoire J.L. Lagrange (membre de l'Université Côte d'Azur). Il vient au CEMEF pour réaliser des manips sur le MEB avec Suzanne. Le contact passe bien, et l'envie de collaborer sur d'autres projets fait le reste. 
 
Suzanne Jacomet travaille dans l'équipe MSR qui s'intéresse aux traitements thermiques. Des analogies sont possibles. En effet, la formation des planètes s'accompagne de phénomènes thermiques similaires. Pour Suzanne, l'étude des astéroïdes sort de son champ d'analyse habituel. Cela ouvre de nouveaux horizons. Et modifie les contraintes. Ici, la vision est à long terme, l'échelle du temps est très différente. Ce qui rend la démarche très différente également. Nous quittons le court terme. Les manips que nous avons faites ici vont servir à la mission Psyche dont la sonde décollera en 2022 avec des premiers clichés en 2026. C'est clairement une autre dimension. 
 
 
L'article "Hypervelocity impacts as a source of deceiving surface signatures on iron-rich asteroids" est paru dans la revue Science Advances, vol 5, n°8, août 2019.
 
 
D'autres collaborations sont en cours également dans le cadre de la mission OSIRIS-Rex ou avec le laboratoire GéoAzur.